Je n’ai pas une nature nostalgique mais, je ne sais pas pourquoi, beaucoup de souvenirs d’enfance me reviennent ce printemps, au travers d’ingrédients que j’utilise pourtant souvent sans y penser. Dans le jardin de ma grand-mère dont je parlais à l’occasion des fèves, il y avait aussi des plantes dont elle savait l’usage et m’expliquait les bienfaits : la bourrache, la verveine et bien d’autres. Pour elle, la verveine justement était surtout une plante médicinale (je ne me souviens plus pourquoi d’ailleurs… la digestion, peut-être ?) et toutes ses plantes finissaient en tisane. Je m’aperçois que je n’ai pas utilisé le mot tisane depuis longtemps. Je dis infusion. Passons.
Depuis que j’habite Paris, je n’ai guère eu l’occasion de trouver de la verveine fraîche jusqu’à l’année dernière. On en vend sur les marchés ici ou là et mon cher primeur Terroirs d’avenir en propose aussi. J’en achète dès que j’en vois, j’en cuisine une partie, j’en fais sécher un peu et je viens de faire un joli sirop vert doré que j’ai congelé. Optimisation maximale de l’achat de la verveine !
La cuisine et ses modes sont en effet passées par là et j’ai découvert les possibilités de la verveine dans les desserts. Je la marie souvent aux pêches et aux fraises, mais ici c’est à la rhubarbe que j’ai décidé de l’associer. J’ai aussi, vous vous en doutez bien, des souvenirs de rhubarbe. Chez une autre de mes grands-mères, à la campagne aussi, il y en avait des pieds énormes au fond du jardin. Je les revois encore. En revanche je n’aimais pas ça, au grand désespoir de ma mère. La rhubarbe est pour elle une affaire de famille : dans son enfance on emportait son pied de rhubarbe dans les déménagements pour la replanter. Il y a des origines normandes de ce côté de ma famille et on aimait la rhubarbe, je me le rappelle confusément, dans une tarte avec de la crème.
Le goût se forme, dit-on, avec le temps et désormais j’adore aussi la rhubarbe. J’en achète chaque année et j’en fais surtout des tartes ou des clafoutis avec des fraises ou d’autres fruits rouges. Cette fois, j’ai renoué avec la crème mais d’une autre façon. J’avais vu passer une recette, dans un vieux numéro de Saveurs, je crois, de rhubarbe pochée. La rhubarbe a tendance à fondre et à compoter alors que, pochée elle garde sa forme et reste un peu croquante. Ca m’a bien plus, surtout avec une petite crème à la verveine par dessus. La recette est rapide, comparée à ce long préambule, mais la crème anglaise représente une petite difficulté.
Rhubarbe pochée et crème à la verveine
Ingrédients pour 2 personnes
- 2 ou 3 tiges de rhubarbe, en fonction de la taille (300g)
- 100g de sucre en poudre
- 1 gousse de vanille
Pour la crème :
- 1 jaune d’œuf
- 1 c à soupe de sucre (15g)
- 1 verre de lait (20cl)
- 10 feuilles de verveine (fraîches ou sèches)
Préparation
Faites bouillir une grande casserole d’eau.
Préparez la rhubarbe en la cassant à plusieurs reprises pour tirer les fils et enlever la peau fibreuse. Puis coupez-la en tronçons de 2 cm environ.
Placez-la dans 1 sac congélation type ziplock, ajoutez les 50 g de sucre, la vanille fendue.
Chassez l’air (vous pouvez vous y aider en mettant votre sac dans de l’eau jusqu’à l’ouverture, la pression aidera à faire un vide relatif).
Coupez le feu sous la casserole quand l’eau est à ébullition, puis plongez le sac. Posez un poids par-dessus pour maintenir le sac dans l’eau. Couvrez et laissez pocher la rhubarbe environ 20 minutes.
Sortez-la des sacs et laissez-la refroidir. Elle sera délicieuse à température ambiante ou rafraîchie. Réservez.
Pendant ce temps préparez la crème anglaise à la verveine :
Vous pouvez multiplier les quantités par 2 ou 3 pour faire plus de crème et la garder 24h au frais pour une autre recette, ou en faire une délicieuse crème glacée en la passant au congélateur….
Rincez et séchez bien les feuilles de verveine. Dans une petite casserole, placez les feuilles de verveine dans le lait et portez à ébullition. Coupez le feu aussitôt et laissez infuser 5 minutes avant de retirer les feuilles.
Faites blanchir le jaune avec les 15 g de sucre dans un petit bol en remuant énergiquement, versez le lait à la verveine tiédi par-dessus, mélangez bien et remettez dans la casserole.
Replacez la casserole sur le feu TRES doux et en remuant sans cesse, doucement, faites prendre votre crème. Elle est cuite quand elle épaissit un peu et nappe la cuillère en bois. Cette étape est un peu délicate si vous n’en avez jamais fait, car la crème peut se séparer si le feu est trop chaud. Mais elle doit tout de même cuire et épaissir. Question de dosage de la chaleur.
Versez la crème dans un petit bol, laissez refroidir, couvrez d’un film étirable jusqu’à utilisation. Réservez au frais.
Au moment de servir, placez les tronçons de rhubarbe sur les assiettes ou dans des petits bols et nappez de crème.
Je n’ai pas eu le temps de le faire, mais vous pouvez peaufiner ce dessert en saupoudrant un peu de pâte à crumble cuite à sec au four, ou servir avec un petit macaron ou un sablé. J’ai utilisé un Digestive du commerce… honte à moi. Mais ça allait bien avec !
Bon appétit !
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